Quand l’épicentre du jeu se trouve à gauche : l’importance vitale de Ricardo Horta et le paroxysme Bruma
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Matthieu Monteiro- 0
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Retour sur l’influence de Ricardo Horta, l’apport de Bruma depuis son arrivée dans le Minho et analyse par conséquent, de l’un des aspects majeurs du jeu en organisation d’Artur Jorge qui a tant contribué au succès de la saison dernière.
« Il y a des joueurs qui comprennent le football et d’autres qui jouent au football. Et il y a de l’espace pour les deux types bien sûr. Il y a des joueurs de ballon et d’autres qui interprètent le jeu. Ricardo Horta est très intelligent, il interprète le jeu et il apporte toujours un plus ». Ces mots sont ceux de Carlos Carvalhal (2022), entraineur du Sporting Clube de Braga entre 2020 et 2022. Suite à la convocation tant attendue en Seleção par Fernando Santos à l’été 2022, de Ricardo Horta. Huit ans après avoir été appelé pour la première fois par Paulo Bento en Septembre 2014.
Récompensant trois saisons, entre 2019 et 2022, à un niveau splendide. Sur cette période, le natif d’Almada marquera 62 buts ; délivrera 23 passes décisives ; gagnera une Coupe de la Ligue (2020) et une Coupe du Portugal (2021) ; atteindra un podium du championnat portugais (2020) et rentrera définitivement dans l’histoire du Sporting Clube de Braga en devenant le meilleur buteur de l’histoire du club rouge et blanc toutes compétitions confondues. Tant en championnat qu’en Coupe d’Europe.
Sans être un grand dribbleur, ni le joueur le plus rapide, ni celui capable de briser deux lignes par la passe, l’international portugais brille par son interprétation du jeu, son interprétation des espaces, tant pour créer que pour finir, et par l’objectivité de ses actions qui le caractérisent. Une forme de simplicité dans son jeu poussant ainsi chaque entraineur, et ainsi quasi tout un club, à construire autour de lui. Et par conséquent, autour d’un côté : le couloir gauche.
Le dernier en date étant Artur Jorge. Amplifiant sans égal l’exploitation de ce couloir gauche bracarense pour atteindre un rendement tout aussi extrême.
Permettant d’ajouter en 2023 un nouveau podium en championnat, cette fois potentiellement qualificatif pour la Ligue des Champions, et une finale de Coupe du Portugal. Deux nouveaux accomplissements atteints par le Sporting Clube de Braga avec Ricardo Horta dans son effectif.
« L’équipe dépend beaucoup de Ricardo Horta, parce qu’elle est construite pour lui. Ce qui, à mon avis, est positif étant donné le joueur différent qu’il est. Il comprend bien le football et aime passer ses journées à regarder des matches. Il possède une qualité supérieure aux autres lorsqu’il s’agit de trouver ses coéquipiers sur le terrain. Et dans la surface, il fait aussi la différence parce qu’il manque rarement le cadre devant le but » confiait cette année son ancien coéquipier Mario Gonzalez au média Zero Zero (2023).
Retour ainsi sur l’histoire récente d’un côté gauche fondateur dans les récents succès du club présidé par Antonio Salvador. Du passage de Sa Pinto jusqu’à l’interprétation proposée par Artur Jorge. Cette dernière, indissociable du rendement atteint en 2023 par un certain Armindo Tué Na Bangna, dit Bruma.
Un peu d’histoire : L’avènement définitif de Ricardo Horta est d’un couloir gauche clé depuis 2019
Même s’il commence la saison 2018/2019 en trombe à l’image de ses 6 réalisations lors des 10 premières rencontres toutes compétitions confondues cette année-là, c’est la suivante qui personnellement, sonne le véritable départ du prime de Ricardo Jorge da Luz Horta. Cette saison 2019/2020 pourtant commandée au départ, par un certain Ricardo Sá Pinto.
Les six mois de l’ancien international portugais seront en effet marqués par cette recherche de valorisation prononcée du couloir gauche du 4-3-3 qu’il cherchera à implémenter lors de la majorité des rencontres qu’il a dirigé. Retrouvant sur ce côté gauche, Nuno Sequeira comme latéral, Ricardo Horta comme ailier et son frère André comme relayeur. Et déjà, les indices d’une légère asymétrie sont visibles. Avec un Paulinho généralement proche de ce pôle gauche pour combiner, fixer et proposer une certaine profondeur. Un Fransergio prédisposée à chercher ces courses depuis sa position de relayeur droit vers la surface. Et l’ailier à l’opposé (Galeno, Wilson Eduardo ou Trincão) occupant l’espace à l’opposé potentiellement plus dégagé et soutenu par les dédoublements de Ricardo Esgaio.
Wenderson Galeno, fraichement arrivé à l’été 2019, aura aussi son nombre d’opportunités à gauche non négligeable. Dans des rencontres néanmoins plus ouvertes, notamment en Europa League, où le caractère plus direct de son jeu s’est exprimé.
La finalité ? Une relation socio-affective Sequeira/André Horta/Ricardo Horta qui ne sera pas assez maximisée. Malgré les connexions et l’entente sur et en dehors du terrain entre ces trois joueurs. Recherchant en trop grande proportion le centre lointain. Dans les 19 passes décisives entre 2018 et 2020 du premier cité, comme témoignage de ses meilleures années, se trouve peut-être une partie de l’explication.
Néanmoins, le manque de variété dans les solutions d’approche des moments d’organisation offensive face aux blocs bas de la Primeira Liga associé à un manque d’efficacité quasi exaspérant (à la fin décembre 2019, Braga était la deuxième équipe la plus sous-performante d’Europe au niveau du ratio xG créés/buts réellement marqués) couteront la tête de Ricardo Sa Pinto. Mais les prémices d’un potentiel à gauche se ressentent à partir de ce moment. Avec Ricardo Horta comme épicentre.
L’affirmation définitive de l’ainé des frères Horta coïncidera avec le retour du 3-4-3 dans les moments d’organisation offensive. Délaissé quelques mois suite au départ d’Abel Ferreira au PAOK. Via le court passage de Ruben Amorim en 2020 puis lors du règne de Carlos Carvalhal entre 2020 et 2022. Notamment sous les ordres du deuxième, Ricardo Horta bénéficiera de cette position moyenne plus axiale, préférentielle, au niveau du couloir intermédiaire gauche.
Le joueur formé au Vitoria FC pouvant désormais recevoir à l’intérieur les transmissions verticales d’un Al Musrati ou Nuno Sequeira. Ce dernier replacé comme défenseur central gauche sous l’entraineur natif de Braga.
Afin de réaliser ce caractéristique contrôle orienté pour se retrouver face au jeu. Puis combiner avec son attaquant grâce à des positionnements plus proches. Paulinho comme complément parfait pendant un temps. Cherchant ensuite constamment cette dernière passe. Tant par le centre que via les courses en profondeur plus ou moins courtes proposées autour de lui. Celles de Wenderson Galeno à gauche à cette position ailier/piston comme symbole.
Etant dans le Top 1% selon Fbref au niveau des passes clés (soient les passes qui amènent directement à un tir) parmi les ailiers/milieux offensifs de Primeira Liga sur les deux dernières saisons.
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Ce positionnement plus axial qui implique enfin, un positionnement naturellement plus proche de la surface. Mettant en évidence son sens du placement au sein de cette dernière et toujours la recherche plus spécifique de cette position légèrement excentrée à gauche du but. Pour ouvrir son pied et enrouler au deuxième poteau. La frappe coup du pied étant néanmoins de plus en plus privilégiée par l’international portugais ces derniers mois.
Autant de raisons qui font de Ricardo Horta un joueur fiable, voire très fiable, dans le domaine de la création et de la finition. Et tant en organisation qu’en transition. Arrivé à l’été 2022, Artur Jorge n’a pas dérogé à la règle de construire son jeu en organisation autour de ce couloir gauche. Bien au contraire.
2022/2023 : L’interprétation du couloir gauche du SC Braga par Artur Jorge
Tôt dans la saison 2022/2023, la première sous les ordres d’Artur Jorge comme entraineur principal, est identifié cet enchainement qui consiste à contourner uniquement les premières lignes du bloc adverse et de retrouver directement, notamment à partir des latéraux, le couloir central. Selon une transmission au sol visant l’espace entre les lignes. Au lieu de complétement contourner le bloc de l’opposant par un centre dans la surface. Et cela malgré le joueur qu’est Simon Banza dans les airs. Et les bons centreurs de plus loin que sont Nuno Sequeira et Victor Gomez. Exploitant néanmoins la qualité de pieds de ces derniers dans les transmissions plus diagonales voire horizontales.
Permettant ensuite de trouver dans les pieds et dans des conditions plus optimales, une des nombreuses solutions se trouvant dans l’axe. Afin d’armer une frappe ou de trouver une dernière passe dans le dos de la ligne défensive. Mais tout cela, dans un périmètre à portée du but adverse !
Exemple concret d’automatisme non mécanique autour des décisions depuis la largeur au niveau du dernier tiers. Ni trop de contraintes qui castreraient le jeu de certains joueurs. Ni trop de choix possibles qui ne seraient pas non plus bénéfiques à la prise de décisions. Juste un conditionnement de ces dernières pour faciliter l’orientation du joueur au sein de son environnement.
La dynamique décrite précédemment entrant dans le cadre d’une idée plus large et fortement exploitée par Braga la saison dernière : celui du surnombre sur un côté ! Afin de surpasser les blocs compacts et reculés rencontrés en championnat
Le principe est en effet de commencer à construire depuis un côté. D’équilibrer ensuite le rapport de force en générant un surnombre permis par la flexibilité du 4-2-2-2/4-2-3-1 d’Artur Jorge avec le soutien d’un des milieux (André Horta majoritairement) ou de l’ailier intérieur à l’opposé. Explorant cette zone sur la largeur en isolant une partie du bloc adverse. Enfin, grâce à de nombreuses fixations, appels en profondeur, mouvements rotationnels, combinaisons proches grâce au surnombre proposé, le déséquilibre se crée régulièrement sur ce côté de départ. Afin d’atteindre ensuite certains chemins bien définis pour créer des occasions à forte valeur ajoutée.
Car en effet, la priorité est loin de renverser au niveau du couloir adverse sur le latéral ou ailier potentiellement projeté à l’opposé. Face à une équipe compacte et bien organisée, si cette translation n’est pas réalisée extrêmement rapidement, l’équipe adverse va assez facilement coulisser et conditionner l’action offensive sur ce couloir contraire.
Ainsi, depuis ce côté de départ de la construction, de nombreux chemins sont possibles après le déséquilibre :
- Trouver la profondeur sur le côté de départ afin de faire reculer la ligne défensive adverse vers son but. Et en profiter pour chercher une solution à contre sens du mouvement défensif adverse et donc en retrait.
- Retrouver le couloir central comme vu précédemment depuis la largeur. Profitant d’un bloc adverse concentré sur le couloir de départ pour exploiter l’espace entre les lignes. Afin de trouver une position de frappe ou de dernière passe en face de la ligne défensive adverse exposée. Tout cela à portée du but adverse puisque dans l’axe.
- Enfin, explorer directement et sans « détour », la zone du deuxième poteau au niveau de la surface adverse. Le reste de l’équipe continuant à avoir des taches précises. Notamment celle d’occuper toujours le dos du latéral ou défenseur central pour l’attaquant à l’opposé.
Et pourquoi ce côté gauche reste largement privilégié dans notre cas d’étude qu’est le Braga d’Artur Jorge saison 2022/2023 (même si à droite, les enchainements apparaissent aussi) ? Par naturellement, la présence de Ricardo Horta au niveau du couloir intermédiaire gauche ! Permettant de graviter autour de l’atout majeur offensif de l’équipe. Tant dans la création que la finition. Afin de le mettre dans les meilleures conditions possibles pour décider.
Enfin, après avoir posé ces concepts théoriques, notre cas d’étude basé sur la performance d’une équipe en en particulier nous oblige à discuter des profils de certains joueurs spécifiquement en plus de Ricardo Horta.
Car c’est bien Vitinha qui commence la saison au niveau de la dernière ligne du flexible 4-2-2-2 d’Artur Jorge. Ouvrant les espaces par ses caractéristiques appels dans la profondeur. Ainsi que sa capacité à peser sur la ligne défensive adverse par ses fixations, son jeu en appui et le gains des duels.
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Pour continuer à maintenir le rendement de ce côté stratégique après le départ de Vitinha à l’OM en janvier dernier, une formule incluant Bruma a été trouvée. Deux joueurs bien différents qui ont impliqué des ajustements naturels. Atteignant un niveau de performance surement au-delà des espérances sur le dernier tiers de la saison.
La touche Bruma pour atteindre un paroxysme
La débâcle de février lors du derby face au Vitoria SC (ndlr. défaite 2-1 à Guimarães) sonnera en effet comme le point de bascule de la saison des hommes d’Artur Jorge.
L’entraineur de 51 ans et son staff se remettant en question suite au début d’année 2023 compliqué de leur équipe. Ajustant ainsi l’organisme vivant et en perpétuel mutation qu’est leur modèle de jeu. Afin d’accueillir un profil d’ailier inédit dans l’équipe tel que Bruma sans révolutionner toute leur organisation collective. A la suite de cette rencontre face au rival éternel, Bruma disputera en tant que titulaire les 12 prochaines et dernières rencontres de championnat. Pour 10 victoires, un match nul face à Porto à domicile et une défaite face à Benfica à Lisbonne. Choix payant et qui emmènera définitivement Braga vers le quatrième podium de son histoire.
L’international portugais apportera ses qualités reconnues de progression balle au pied et de dribble. Etant dans le Top 1% selon Fbref au niveau des possessions progressives, des dribbles tentés et des dribbles réussis parmi les ailiers/milieux offensifs de Primeira Liga la saison dernière.
Tout en respectant et comprenant le modèle de jeu. Contribuant tout d’abord dans l’attaque de la profondeur manquante depuis le départ de Vitinha. Tant très excentré depuis le couloir gauche. Qu’à un niveau plus axial entre le défenseur central et le latéral droit adverse.
L’importance de trouver cette ligne de passe vers le demi-espace gauche occupé par Ricardo Horta, les mouvements rotationnels sur ce même côté, les fixations mais par un positionnement à l’intérieur ou la relation créée avec Abel Ruiz pour atteindre l’espagnol au premier poteau comme démonstration de sa compréhension rapide des dynamiques de sa nouvelle équipe et de la relation créée rapidement avec ses partenaires d’attaque.
Un ensemble qui fera du natif de Bissau, l’un des tout meilleurs joueurs offensifs en deuxième partie de saison. Etant aussi dans le Top 1% selon Fbref au niveau des actions menant à un but parmi les ailiers/milieux offensifs de Primeira Liga la saison dernière.
Mais un club comme le Sporting Clube de Braga, qui vit de la valorisation économique de ses joueurs, peut-il se permettre de mettre le deuxième plus gros montant de son histoire pour un garçon qui aura 29 ans cette année ? C’est ici une question de direction sportive qui se pose. Et qui a le mérite de se poser.
N’y avait-il pas un d’aussi bons ailiers sur le marché, pour le même montant. Autant capable d’apporter leurs qualités de provocation tout en comprenant rapidement les demandes collectives du poste mais étant plus jeune et pouvant être valorisé ?
Le Sporting Clube de Braga a privilégié un autre versant de la question. Celui du sportif afin d’entamer avec des certitudes un mois d’Août si dangereux. Fait de tours préliminaires de Ligue des Champions.
